La vérification des faits en langues officielles reste un outil sous-exploité. Pourtant, il pourrait toucher plus largement les populations et renforcer la lutte contre la désinformation.
A |
Au Mali, où WhatsApp, TikTok et Facebook sont devenus des canaux majeurs d’information, la désinformation se propage à grande vitesse. Pourtant, une large partie de la population, notamment en zones rurales et parmi les personnes peu alphabétisées, reste sans défense face au phénomène.
En 2024, 40 % des adultes maliens ne savaient ni lire ni écrire, selon l’Institut national de la statistique (INSTAT). D’où l’urgence de promouvoir la vérification des faits et l’éducation numérique en langues officielles, plus accessibles et mieux adaptées aux réalités du pays.
Pour mieux communiquer
Au Mali, les langues officielles sont le principal vecteur de communication. Pourtant, la plupart des contenus de vérification des faits sont publiés en français, souvent inaccessibles à une grande partie de la population. Pendant ce temps, les fausses informations circulent rapidement sur WhatsApp et TikTok, dans des formats vocaux ou vidéos en langues officielles, leur donnant plus de crédibilité et d’impact.
Pour contrer cette dynamique, certaines initiatives locales ont vu le jour. Depuis 2019, des plateformes comme celle de l’Association des blogueurs du Mali (ABM) ou La voix de Mopti publient des contenus en bamanankan afin de toucher un public plus large et non francophone.
Ces efforts, bien que prometteurs, restent encore trop dispersés. Il devient urgent de structurer ces actions à plus grande échelle, en soutenant les créateurs de contenus locaux, en intégrant les langues officielles dans les formations à la vérification des faits, et en produisant régulièrement des capsules audio ou vidéo adaptées aux usages des communautés.
Les défis à relever
Malgré des initiatives prometteuses, la vérification des faits en langues officielles au Mali reste freinée par plusieurs obstacles. D’abord, le manque de journalistes et créateurs formés, capables de produire régulièrement des contenus en langues officielles freine son développement. Ce double savoir technique et linguistique est rare et souvent peu valorisé.
Ensuite, les contenus peinent à circuler efficacement. Contrairement aux fausses informations qui se propagent facilement via WhatsApp ou TikTok, les relais communautaires et médias locaux ne sont pas assez mobilisés ni coordonnés pour diffuser ces contenus.
Par ailleurs, l’insuffisance de financements dédiés limite la production et la pérennité des contenus. L’instabilité politique et sécuritaire dans certaines régions du pays constitue aussi un frein à l’implantation durable de ces initiatives. Former de nouveaux acteurs locaux, soutenir les médias de proximité, améliorer l’accès numérique, sécuriser les zones à risque, et adapter les outils aux langues officielles sont des pistes clés pour renforcer cette lutte essentielle.
Par Abdoul Salam Dicko
En savoir plus sur Mali 24
Subscribe to get the latest posts sent to your email.