Les poches de rétraction tympanique : une séquelle des inflammations chroniques de l’oreille moyenne
N’faly Konaté *, Kassim Diarra, Mohamed Amadou KEITA
Service ORL-CCF Hospital Gabriel Toure, Bamako,Mali
Auteur Correspondent: Dr N’faly Konaté
E-MAIL : konatn2@gmail.com
1Chargé de recherche au service d’ORL et Chirurgie cervicofaciale du CHU Gabriel Touré de Bamako
OBJECTIF :
Cette étude a pour objectifd’expliquer au public une des séquelles des inflammations chroniques de l’oreille(poches de rétraction tympanique), comment se fait sa prise en charge dans le service d’ORL du CHU GT et quels en sont les moyens de prévention.
PATIENTS ET METHODE
Nous avons mené une étude sur une période de 15 mois ; allant du 1er février 2020 au 31 Mai 2021 à partir des dossiers de patients reçus en consultation externe dans le service d’ORL et de Chirurgie Cervico-faciale du CHU Gabriel Touré de Bamako et présentant une poche de rétraction tympanique.
Ce que nous avons obtenu comme résultats
Au total, 9400 patients ont consulté dans le service d’ORL pendant la période d’étude. Une poche de rétraction a été diagnostiquée chez 70 patients, soit 0,74% de l’ensemble des consultations.
Ce qu’il faut retenir
L’oreille comprend trois parties : une partie externe (oreille externe), une partie moyenne(oreille moyenne) et une partie interne (oreille interne). La partie moyenne est constituée par la membrane tympanique en dehors. La membrane tympanique est rigide puisque qu’elle est constituée de trois couches(couche externe cutanée faite de peau, couche intermédiaire fibreuse et rigide et interne muqueuse).La poche de rétraction se définit comme une zone de la membrane tympanique, fragilisée par une atteinte de la couche fibreuse, qui serétracte vers l’intérieur. Cette fragilité localisée de la membrane tympanique est la conséquence des infections de l’oreille (otite) négligées ou mal traitées souvent depuis l’enfance. En effet l’oreille moyenne peut être assimilée à une chambre (caisse du tympan) avec un plancher (rez-de-chaussée), un toit et quatre murs (parois) dont l’intérieure doit être aéré en permanence. Cette aération se fait à travers la trompe auditive (tuyau qui relie l’oreille et le nez) et les cavités d’arrière (mastoïde). Lorsque le tuyau d’aération est bouché par une inflammation du nez par exemple, la chambre (caisse)n’est pas bien aérée et il se crée une pression négative dans la caisse. Cette pression agit sur les parois et les zones fragilisées ont tendance à être aspirées vers l’intérieur d’où la notion de poche de rétraction.
Quelles sont les conséquences de son évolution ?
Lorsque la pression négative s’intensifie la zone de la membrane fragilisée s’invagine totale et commence à détruire les structures intérieures (osselets de l’ouï, parois et leur contenu et les structures voisines).
Comment prévenir les séquelles des otites
Nous avons mis l’accent sur deux points essentiels :l’inflammation ou l’infection de l’oreille négligées ou mal traitées et l’existence de pression négative dans la caisse. Vous ne devez pas négligez les plaintes d’oreille de vos enfants. Ppour les nouveau-nés et les nourrissons, lorsque vous constatez des pleurs incessantes, des fièvres inexpliquées ou lorsque les enfants portent fréquemment la main aux oreilles, faites rapidement une consultation chez un spécialiste ORL. Ne banalisez pas les rhumes des enfants puisque l’aération de l’oreille se fait par le nez.
Ce que nous avons comme moyens de traitement
La conduite à tenir du spécialiste de l’oreille consiste à évaluer par des examens cliniques les caractères de la poche de rétraction (mobile ou fixe, décollable par certaines manœuvres ou pas, fond visible ou pas, présence de débris de squames) et son retentissement sur l’audition. Dans notre série,les poches étaient contrôlables et sans débris dans tous les cas, et décollables dans 72,22% des cas et non décollables et contrôlables dans 25% des cas, non décollables et non contrôlable dans 2,78%. Lorsqu’il existe un retentissement sur l’audition au delà de 35db à l’audiométrie, il est utile de réaliser un scanner de l’oreille pour évaluer l’étendue de la poche. Nous avons réalisé un scanner de l’oreille chez deux patients. Pour les poches mobiles, décollables, dont le fond est bien visible,le chirurgien de l’oreille doit juste s’abstenir et surveiller la poche par des contrôles trimestriels ou semestriels. Dans certains cas, un traitement par les médicaments pour reperméabiliser la trompe peut être nécessaire. Pour les poches non décollables et contrôlables il peut être utile de pratiquer une intervention pour aérer la caisse par la mise en place d’un petit tuyau (aérateur) au cadrant antéro-supérieur du tympan. Dans notre étude, l’aérateur transtympanique (ATT) a été mise en place chez 7 patients. Pour les poches non contrôlables on peut réaliser une chirurgie pour renforcer la membrane tympanique (tympanoplastie de renforcement) par un greffon de cartilage prélevé au niveau du lobule de l’oreille. Pour poches plus étendues avec destruction des structures voisines (cholestéatome) on pratique une chirurgie des cavités postérieures de l’oreille pour enlever la matrice de peau présente dans l’oreille et les tissus osseux nécrosés avec souvent un temps reconstitution pour préserver la fonction de l’oreille. Le renforcement tympanique a été réalisé chez un de nos patients de même la chirurgie des cavités de l’oreille avec des résultats prometteurs.
CONCLUSION
Les poches de rétraction tympanique constituent une entité nosologique particulière qui mérite une surveillance rigoureuse. L’érosion des osselets de l’ouï et leur risque potentiel évolutif vers le cholestéatome (présence de peau dans la chambre de l’orelle) doivent être connus de tout praticien ORL. L’enjeu majeur réside surtout dans la diversité des options thérapeutique qui reste encore un sujet d’actualité.
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