Lutte contre la corruption au Mali : Qu’en est-il de la protection des journalistes et lanceurs d’alerte ?

La corruption, considérée par certains spécialistes comme un cancer entravant le développement du continent, prend de l’ampleur dans notre société, engendrant des conséquences néfastes. Les journalistes, les professionnels des médias et les lanceurs d’alerte jouent un rôle crucial dans la lutte contre ce fléau en étant les premiers maillons de cette chaîne.

Depuis longtemps, la presse malienne évoque la nécessité d’un mécanisme juridique pour protéger les journalistes, les professionnels des médias et les lanceurs d’alerte impliqués dans la lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite. Cette question est au cœur des préoccupations des différentes instances dirigeantes du secteur.

La célébration de la 7ème édition de la Journée Africaine de lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite, organisée le mardi 11 Juillet 2023 par l’Office Central de Lutte contre la Corruption et l’Enrichissement Illicite (OCLEI), a une fois de plus souligné l’importance du rôle de la presse dans la lutte contre ce fléau qui menace notre société.

Alexis Kalembri, fondateur et directeur de publication du journal « Mali-Tribune », soulignait déjà lors de la 4ème édition de la journée d’échanges Justice-Presse le 13 octobre 2022 à la maison de la presse, que le travail des journalistes est primordial pour informer les citoyens et dévoiler les malversations au public.

Il est indéniable que les médias jouent un rôle essentiel dans la chaîne de lutte contre la corruption. Toutefois, les journalistes font face à des difficultés extrêmes lors de leurs enquêtes et s’exposent à des représailles qui mettent leur sécurité et leur vie en péril, comme le déclarait M. Kalembry. Au Mali, l’apport des journalistes dans la lutte contre la corruption est souvent jugé en-deçà des attentes par de nombreux observateurs, comme l’a rapporté le président de l’OCLEI, Dr Moumouni Guindo, lors d’une journée d’échanges avec la presse en 2022, selon le journal « l’Essor ».

Cette situation met en évidence le caractère essentiel et risqué du travail des journalistes concernant le traitement des sujets relatifs à la corruption et à l’enrichissement illicite au Mali. Il devient donc urgent de mettre en place un mécanisme juridique de protection des professionnels des médias et des lanceurs d’alerte.

Daouda dit Tougan Konaté, directeur de publication du journal d’investigation « L’Investigateur », affirme que le travail des journalistes est d’une importance capitale dans la lutte contre la corruption. Cependant, en dehors de la loi 046 portant régime de la presse et délit de presse, ils ne bénéficient d’aucune protection. Les journalistes, notamment lorsqu’ils traitent des dossiers sensibles sur la corruption, sont exposés et laissés à la merci de leurs bourreaux, qui peuvent même exercer un droit de vie ou de mort sur eux. Les nombreux journalistes ayant eu des déboires avec la justice, subi des intimidations voire des menaces de mort pour avoir dénoncé des faits de corruption en témoignent. Dans cette situation, le journaliste n’a souvent d’autre choix que de se cacher ou de s’exiler pour protéger sa vie, car, dit-on, le bon journaliste est celui qui est en vie.

Afin de garantir un environnement propice aux journalistes dans l’exercice de leur travail, les autorités sont appelées à s’impliquer activement dans la lutte contre la corruption.

Par ailleurs, la coalition des organisations de la société civile pour la lutte contre la corruption et la pauvreté a plaidé auprès du Conseil National de Transition (CNT) pour l’adoption d’une loi visant à protéger les lanceurs d’alerte dès décembre 2022. En complément, la rédaction d’un avant-projet de loi sur la protection des lanceurs d’alerte est également en cours.

En conclusion, la lutte contre la corruption au Mali ne pourra être efficace sans une protection adéquate des journalistes, des professionnels des médias et des lanceurs d’alerte, qui jouent un rôle essentiel dans la révélation et la sensibilisation du public sur ce fléau. Un mécanisme juridique solide est donc nécessaire pour assurer leur sécurité et leur permettre d’accomplir leur mission sans crainte de représailles.

Mohamed A Kanouté

Source : Mali24

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