La cocaïne en Guinée et au Mali : La face invisible de l’iceberg
Les statistiques glanées de part et d’autre au Mali et en Guinée en matière de saisie de drogues ne sont finalement que de la poudre aux yeux. Une énorme quantité de cocaïne, d’une valeur marchande estimée à plusieurs centaines de millions de F CFA, passe en effet entre les mailles des dispositifs de contrôle fixés par les États. La parade est ainsi toute trouvée pour enfumer l’opinion publique sur l’enjeu véritable du trafic et de la consommation d’un stupéfiant qui décime lentement et entraine à la dérive des sociétés entières.
La Guinée et le Mali ne servent plus seulement de point de passage pour la cocaïne, mais de base arrière pour les narcotrafiquants, portés par une protection qui ne dit pas son nom. Attendue quant à l’issue de la kyrielle de cas à elle soumis, la justice elle-même a souvent trouvé la panacée pour « blanchir cette clientèle » d’une autre galaxie.
Au Mali, la lutte de façade
Bagadadji, la promenade des Angevins au Raïda, l’auto gare de Sogoniko… connus pour être les temples du trafic et de la consommation de la drogue à Bamako sont la partie visible d’un phénomène qui atteint des limites insoupçonnées. L’enjeu, selon une base de données à notre disposition, se joue ailleurs, au plus haut niveau.
Si des quantités énormes de cocaïne traversent le Mali pour les pays côtiers dont principalement le Sénégal et la Gambie, une panoplie de rapports de recherches élaborés par des acteurs dont l’Association malienne de lutte contre la drogue (AMLD) établissent que les dérivées synthétiques de la cocaïne sont bien présentes, vendus et consommés au Mali.
Au 1er trimestre 2023 plus de 300 Kg de cocaïne ont été saisis à la frontière Mali/Sénégal pour l’Europe.
La dernière saisie officielle de cocaïne au Mali date de fin avril 2023 où la Douane aéroportuaire malienne a intercepté à l’aéroport 6 kg de cocaïne en partance pour l’Europe.
Février 2021, la Cellule aéroportuaire anti trafic de l’Office central des stupéfiants (OCS) a mis le grapin sur 3,26kg de cocaïne avec emballage à l’Aéroport international de Bamako-Senou. D’une valeur marchande de 80 000 000 F CFA, le coke saisi était à bord d’un vol commercial en provenance de Sao Polo via Addis Abeba.
Le suspect de nationalité nigériane devait livrer la cocaïne à un réseau informel de trafiquants au plan national auprès duquel se ravitaillent de gros consommateurs.
Entre 2012 et 2015 l’OCS a effectué d’importantes saisies de drogues, dont 36,4 kg de méthamphétamine, d’une valeur de plus de 5 milliards de FCFA et 20 kg de cocaïne, d’une valeur marchande de plus de 900 millions de FCFA.
Toutes les régions administratives, tous les cercles et communes du Mali connaissent de nos jours à la fois le trafic et la consommation de drogue.
Les chiffres officiels susmentionnés concernant les saisies de cocaïne en particulier ne sont que poussières. En gros, la part de cette drogue apparait insignifiante dans les rapports officiels pour deux raisons :
La cocaïne pure est une drogue trop onéreuse pour être consommée en quantité par le grand nombre.
Aussi, selon certains experts de la lutte contre les stupéfiants, la cocaïne est le type de drogue dont les circuits de ravitaillement et de commercialisation sont des plus corsés au Mali et ailleurs. « De très grand moyens sont mis en jeu pour permettre au coke de passer entre des mailles insoupçonnables. Les complicités établies autour du trafic de la cocaïne font que cette drogue peut curieusement passer entre les filets aéroportuaires », argumente sous anonymat ce responsable d’ONG.
Ainsi, au regard de cette tendance généralisée, le trafic et la consommation de la cocaïne au Mali revêt un caractère assez particulier.
Quand la justice ne fait pas peur
Les textes et la justice ne suffisent assurément plus à lutter contre un phénomène qui échappe au seul contrôle de l’Office central des stupéfiants (OCS) et la brigade anti stupéfiant dont les interventions ne se limitent plus qu’à produire des rapports jugés trop approximatifs et loin de refléter la vérité des chiffres.
Plusieurs aspects de la consommation et du trafic échappent en effet à ces entités créées par l’Etat depuis l’affaire Air Cocaïne en 2009 à Bourem, au nord du Mali.
A ce jour les associations et autres entités de la société civile se débattent comme de beaux diables pour faire de l’impact dans la lutte. C’est sans ignorer les risques énormes encourus. Certains d’entre elles ont tout simplement déposé les clés par « manque de protection de l’Etat ». Elles prétendent s’engager au péril de leur vie dans le risque et le danger.
Un document confidentiel donne les localités de Sikasso et de Bamako pionnières en matière de consommation de la drogue. Sans oublier les régions du nord du Mali où la population abandonnée à elle-même par endroits bascule facilement dans le trafic et la consommation de la drogue.
A Gao, selon des recoupements auprès des ONG et associations luttant contre les stupéfiants, plus de 90% de la population consomment d’une manière directe ou indirecte la drogue jusque dans leurs assiettes.
Au Mali tout comme dans les autres pays du sahel la drogue apparait comme la mère de toutes les violences (au nord du Mali en particulier) et est perçue comme le principal élément sur lequel surfe l’extrémisme violent qui met à mal la cohésion sociale et la sécurité dans les régions septentrionales du pays.
Naguère zone de transit de la Cocaïne vers l’Europe et autres destinations, le Mali dévient une étape où la consommation s’enracine à une vitesse inquiétante.
Les rapports de l’Office central de lutte des stupéfiants (OCS) donnent à peu près la tendance du trafic et de la consommation sans pour autant prétendre servir de baromètre absolu. Plusieurs aspects de la consommation échappent encore aux dispositifs étatiques de lutte contre la drogue.
Ainsi, au regard de cette tendance généralisée, le trafic et la consommation de la cocaïne au Mali revêtent un caractère assez particulier.
Plusieurs acteurs alimentent le trafic et la consommation devenus une véritable préoccupation nationale.
L’incontournable corridor Bissau Guinéen qui alimente le Sahel, l’Afrique de l’ouest et l’Europe
La série noire des saisies de cocaïne au Mali et ailleurs semble montrer que la Guinée Bissau, après une baisse des saisies entre 2014 et 2018, est de retour aux affaires.
La Guinée Bissau demeure jusqu’à preuve du contraire le corridor implacable pour la cocaïne qui arrive de l’Amérique Latine. La drogue remonte ainsi vers le Mali pour d’autres destinations dont le Sahel, l’Afrique de l’Ouest et l’Europe.
En mars 2019, près de 800 kilogrammes de cocaïne sont saisis à Safim, à une quinzaine de kilomètres de Bissau sur la route du Sénégal. La drogue était dissimulée dans un camion sénégalais en partance pour la Mauritanie puis le Mali.
Le Mali, dans le tourbillon d’une insécurité aggravée par l’instabilité politique, voit plusieurs parties de son territoire échapper à son contrôle en raison de l’instabilité socio politique avec son corollaire d’insécurité généralisée. Une situation bien profitable aux narcotrafiquants qui opèrent dans des régions ou zones incontrôlées par l’Etat du Mali.
Selon le rapport 2020 du Groupe d’expert des Nations unies sur le Mali, le « flux de stupéfiants le plus régulier à travers le Mali reste celui du haschich marocain qui transite par la Mauritanie et le Mali puis prend la route de la Libye en traversant le Niger ».
« Le transport de cocaïne qui converge aussi au Mali emprunte les mêmes routes quand ce n’est pas les mêmes camions. Les points de passage sont alors la cause d’affrontements entre bandes armées qui souhaitent en avoir le contrôle », développe le même document.
Des pistes « évitées » par la justice
Les structures publiques et autres sources impliquées dans la lutte contre le phénomène au Mali feignent de reconnaitre l’existence de réseaux de trafic de cocaïne structurés et reconnus comme tels.
De son côté, la justice ne jouit pas de la plénitude de son statut de 3ème pouvoir et donc d’une pleine indépendance lui permettant d’ouvrir des instructions, et d’aller au bout. Nonobstant des pistes plausibles existantes, les enquêtes n’ont jamais pu permettre d’établir des complicités au plus haut niveau.
L’ancien Patron de la Sécurité d’Etat du régime défunt d’Ibrahim Boubacar Keïta, Gal Moussa Diawara, a fait l’objet de lourds soupçons lui attribuant une image de « trafiquant de drogue ». Une partie de sa fortune serait venue de là. Curieusement aucune trace d’enquêtes dans les annales de la justice le concerne.
Reste encore vivace dans les esprits la célèbre affaire « Air cocaïne » qui avait défrayé la chronique en 2009 où un avion-cargo rempli de cocaïne a atterri en plein désert de Tarkint, près de Gao, et consumé par ses occupants après que ceux-ci ont pris le soin de vider l’appareil de son contenu. L’équipage s’est volatilisé, ainsi que le chargement.
Dans ce qu’il est convenu de qualifier de mascarade judiciaire, qui s’en est suivi, un haut responsable d’alors du Ministère malien de la justice se rappelle encore des « pressions pour obtenir la libération des deux principaux suspects » arrêtés dans le cadre de l’enquête, sans en préciser l’origine.
Deux ans après le forfait, la justice malienne à travers le procureur anti-corruption de l’époque, Sombé Théra, inculpait officiellement dans une déclaration lue à la télévision nationale trois personnes de « trafic international de cocaïne ». Une des rares fois où la justice semblait véritablement faire front contre le trafic de drogue au Mali.
Ce réseau qui comprenait le très célèbre homme d’affaire malien Mohamed Aly dit Ben Hacko, PDG de Go Voyages, a laissé des stigmates qui continueraient d’opérer sous très haute protection.
Coup de théâtre, l’affaire « Air cocaïne » a été vidée et rangée dans les placards de la justice malienne. Selon nos vérifications Ben Hacko et compagnies arrêtés et incarcérés pendant 2 ans n’étaient en réalité que des menus fretins dans cette rocambolesque affaire qui continue de faire des vagues.
En outre, une source à la justice évoque l’état d’hibernation de l’instruction concernant des cas graves impliquant des trafiquants de grands chemins dont il ne saurait s’aventurer à donner les détails.
En Guinée, le coup d’épée dans l’eau
Les nombreuses saisies de cocaïne en Guinée ces trois dernières années donnent de forts indices de recrudescence du trafic dans le pays. Le trafic et la consommation de la cocaïne y prennent des proportions jamais égalées, et surtout échappent en partie au contrôle des structures publiques dédiées à la cause.
A Conakry cette drogue circule et est consommée par une frange de « la population disposant de moyens ». Le prix d’un demi-gramme (0,5) considéré comme une dose par les consommateurs, varie entre 200 à 300 mille francs guinéens.
Une enquête de l’office central anti-drogue publiée en 2015 révélait déjà une situation assez préoccupante. Les revers socio sanitaires sont tout aussi préoccupants.
Courant 2021, 100 kg de cocaïne dont la provenance reste inconnue ont été découverts dans une résidence au quartier Nongo, en haute banlieue de Conakry.
Les deux derniers rapports du service d’aide aux jeunes en situation difficile par la drogue en Guinée démontrent que le taux de consommation de la drogue ne fait que s’accroître dans le pays. Cette organisation qui dispose d’un centre de désintoxication a reçu 67 patients en 2021. En 2022, le nombre de patients a doublé pour atteindre 134 personnes.
Le jeu des narcotrafiquants est savamment orchestré en Guinée. En juillet 2022, des réseaux espagnols, syriens, nigérians ont été démantelés, avec des connections probables impliquant des réseaux latino-américains.
Des hauts gradés de l’armée sont aussi cités pour avoir dissimulé un important lot de cocaïne saisie.
Une situation qui laisse croire que des acteurs de la chaîne de répression pourraient forcément être impliqués dans le trafic.
La périlleuse opération de surveillance des côtes
La voie maritime en Guinée constitue une des pistes les plus utilisées par les narcotrafiquants, pour le transport de leurs substances. Au mois d’avril dernier, la direction de l’information et des relations publiques de l’armée annonçait que la marine nationale avait saisi 1,5 tonne de cocaïne sur un navire battant pavillon sierra-léonais. L’équipage du navire était composé de trois sierra-léonais, trois ghanéens et de trois guinéens.
Le pays qui dispose de 300 kilomètres de côtes fait sans doute partie des pays de transit. Ici les forces de défense et de sécurité en l’occurrence la marine nationale ne sont pas suffisamment outillées pour contenir les trafiquants qui foisonnent le long des côtes.
Même s’il existe un dispositif de contrôle au port autonome avec la présence des unités de la douane, les trafiquants de drogue ont réussi à trouver un nouveau modus operandi. La cocaïne se transporte donc par des navires de pêche.
En 2022, des ressortissants turcs ont été arrêtés au port autonome de Conakry pour détention de 299,29 kilogrammes de cocaïne par la brigade des unités flottantes de la marine nationale. Sur sept personnes impliquées dans cette affaire, cinq ont été interpellées, jugées puis condamnées à 10 ans de réclusion criminelle pour détention, importation et transport international de drogues à haut risque. Les trafiquants fugitifs ont écopé de 20 ans de réclusion criminelle.
En février 2023, 1,5 tonne de cocaïne sera saisie dans les eaux guinéennes à bord d’un navire battant pavillon sierra-léonais. Les enquêtes n’ont rien donné.
L’une des grosses difficultés, aux dires du point focal de l’Office des Nations Unies de lutte contre la drogue, est que : « Il y a des maisons en bordure de mer où les bateaux peuvent accoster afin de débarquer la cocaïne sans passer par le port autonome ».
Cette révélation trouve son illustration dans la saisie de 100 kilogrammes de cocaïne dans une villa en bordure de mer, le 14 janvier 2021 par la brigade anti-criminalité. Là également les enquêtes n’ont pas abouti. L’opinion publique continue de s’interroger sur les auteurs de ce forfait, notamment sur l’identité du propriétaire de la fameuse villa…
Le scanneur permettant de détecter la drogue au niveau du port ne suffit plus. Les trafiquants réussissent en effet à contourner ce dispositif qui ne s’applique qu’aux conteneurs. « On passe par les bateaux de pêche qui vont larguer la drogue en pleine mer, et les bateaux de pêche viennent récupérer la matière parce que ces navires ne passent pas par le scanneur. Il y a beaucoup de dissimulation. Malheureusement, la drogue qui tombe chez nous, c’est la cocaïne emballée dans des sacs imperméables à l’eau », déplore le représentant de l’agence de l’ONU chargée de lutter contre la drogue en Guinée.
La voie aéroportuaire en est une autre piste souvent explorée par les narcotrafiquants. En octobre 2022, une jeune fille ivoirienne porteuse de 3 kg de cocaïne avait été interpellée par les services des douanes de l’aéroport international de Conakry en partance pour Casablanca.
Quelques jours plus tard, c’est 7 kg de cocaïne qui seront également saisis sur une autre passagère guinéenne en route toujours pour Casablanca.
Plus de 10 kg de cocaïne en transit pour l’aéroport international de Conakry ont été saisis sur un vol commercial à l’aéroport Charles De Gaulle de Paris, le 23 avril 2023.
Selon différents recoupements auprès des acteurs de la chaîne de répression, le porteur du colis était de nationalité brésilienne et avait pu obtenir un visa d’entrée en Guinée en tant que touriste. Il devait séjourner pendant 13 jours en Guinée, ce après avoir payé son billet d’avion à Freetown en Sierra Leone, le 18 avril 2023.
Il y a quelques semaines, trois officiers des douanes en service à la brigade de ciblage ont fait l’objet de suspension de leurs postes à l’Aéroport international, Ahmed Sékou Touré de Conakry. Une mesure qui conforte les soupçons de complicité entre les acteurs de la chaîne de contrôle, et les narcotrafiquants.
Les frontières terrestres constituent également des points de transit de la drogue. Pamelap, dans la préfecture de Forécariah n’est pas en reste.
« Malgré le dispositif sécuritaire posté à cet endroit, nous n’arrivons pas à contrôler toute la zone. A la frontière entre la Guinée et la sierra Leone, les trafiquants arrivent à tromper notre vigilance. On dirait que les narcotrafiquants ont des indicateurs parmi nous », déplore un agent de la douane guinéenne.
Même décor à Kouremalé (frontière terrestre entre le Mali et la Guinée) où les agents en poste à différents endroits peinent à contenir un trafic qui étend ses tentacules depuis la Guinée Bissau perçu comme le point de passage du stupéfiant le plus précieux.
Des trafiquants constitués en réseaux essaiment
Les réseaux de trafiquants identifiés à ce jour par la police guinéenne sont principalement syriens, espagnols et nigérians. Selon des sources judiciaires et policières ces groupes mafieux ont sans doute des complices en Guinée. « Ils emploient généralement de jeunes guinéens notamment des femmes pour le transport de leurs marchandises », précisent-elles.
Plusieurs hauts gradés de la brigade anti-criminalité (BAC) ont d’ailleurs été interpellés et déférés à la maison centrale de Conakry, le 12 février 2021. Ils sont en effet soupçonnés d’avoir dissimulé un important lot de cocaïne saisie dans une résidence en haute banlieue de Conakry.
Il faut rappeler que, en févier 2009, le fils de l’ancien président guinéen Lansana Conté, un ancien haut gradé de l’armée, avait avoué publiquement être impliqué dans une affaire de trafic de drogue. A sa suite, le jeune frère de l’ancienne première dame, épouse de feu général Lansana Conté, avait également avoué être impliqué dans une affaire de trafic de cocaïne en complicité avec des colombiens.
L’arroseur arrosé
La lutte contre la drogue en Guinée balance entre le black-out de la justice et la corruption d’acteurs engagés dans la lutte.
Des ONG apposent un regard très mitigé sur la justice guinéenne. L’indépendance de celle-ci est mise à rude épreuve chaque fois qu’elle doit se pencher sur des dossiers liés à la consommation et au trafic de drogue.
Le coordinateur d’une ONG œuvrant pour l’assistance des jeunes en situation difficile due à la drogue, est convaincu que les narcotrafiquants usent de leurs moyens pour corrompre beaucoup d’acteurs, qui luttent contre la drogue, notamment les magistrats.
« Les trafiquants de drogue ce sont des réseaux puissants qui ont des moyens et des facilités à tous les niveaux. Ils bénéficient souvent d’une influence à travers leurs moyens par l’achat de conscience des magistrats ainsi de suite. Même pour franchir les frontières, ils ont des complices qui leur permettent vraiment de passer pour distribuer leurs substances », martèle-il.
Des anecdotes judiciarisées mais non élucidés
Le 25 juillet 2022, le procès des trois latino-américains susmentionnés et poursuivis pour complicité de trafic international de drogue et de blanchiment d’argent, s’est ouvert au tribunal de première instance de Dixinn (Conakry). Il s’agit d’Alberto Aluarez Torres, Edison Castano Zapata et de Lazaro Diaz. Ces prévenus sont renvoyés devant cette juridiction pour s’être impliqués dans l’implantation d’une entreprise de glaces, qui appartiendrait à un présumé trafiquant de drogue du nom d’Ariza Monje Ricardo.
Les débats se sont poursuivis jusqu’aux plaidoiries. Le 17 octobre 2022, le ministère public avait d’ailleurs requis dix (10) ans de prison contre les trois accusés, alors que le nommé Ricardo dont le nom a été cité, n’avait jamais fait l’objet de poursuite.
Selon le procureur en charge du dossier, c’est vrai que le nom d’Ariza Monje Ricardo a été cité dans cette affaire, mais son inculpation n’a jamais été prouvée.
En plus, le procureur précise que Ricardo n’a jamais été interpellé à ce propos, et que le tribunal a décidé de ramener le dossier devant un juge d’instruction.
« Le dossier est en information judiciaire. C’est pourquoi je ne peux pas divulguer ces informations. Les trois prévenus sont toujours en détention. C’est l’information qui va déterminer si Ariza est le présumé auteur ou pas », précise-t-il.
Maître Jean-Baptiste Jocamey Haba, l’avocat d’Edison Castano Zapata dans cette affaire, s’est montré assez confus face à ce revirement du tribunal.
« On avait totalement fini. Le procureur avait requis, tous les avocats ont plaidé, et l’affaire a été mise en délibéré en début du mois de novembre. Une fois après ça a été prorogé et la semaine qui a suivi moi-même pendant que je n’étais pas en Guinée, j’ai été informé que le juge avait pris la responsabilité d’ordonner la réouverture des débats, et la mise en place d’une commission rogatoire dont l’objectif était de faire un transport judiciaire, dans la préfecture de Boffa où semble-t-il se trouverait une usine de glaces appartenant à Ricardo, ce présumé auteur qu’on ne connaît pas, et qui n’a jamais été renvoyé devant le tribunal », a-t-il confié.
Cet avocat inscrit au barreau de Guinée révèle que depuis qu’un juge d’instruction a été commis à cet effet, la procédure a connu une gestion « calamiteuse ».
« Je n’ai pas compris pourquoi le juge avait rabattu le délibéré pour ordonner une telle mesure. Je n’ai pas compris pourquoi depuis tous ces mois on ne parvient pas à exécuter une décision aussi simple, c’est-à-dire un transport judiciaire. Je ne sais pas non plus pourquoi lorsque nous étions en procès, le juge nous a laissés plaider et requérir, avant de prendre une telle mesure. Et malheureusement à cause de ça l’affaire retarde », regrette Maître Jocamey Haba.
Alors que la mesure de transport judiciaire peine à être exécutée, les trois prévenus restent à la maison centrale de Conakry, où ils sont détenus depuis juillet 2021.
David Dembele & Hadja Kadé Barry
Source: L’Investigateur