Attaques djihadistes en série : l’Algérie règle-t-elle ses comptes avec le Mali ?
La récente montée des tensions diplomatiques entre l’Algérie et le Mali semble coïncider avec une recrudescence inquiétante des attaques djihadistes dans le nord du pays. Ces développements soulèvent des interrogations quant à l’implication indirecte ou du moins la complaisance de l’Algérie face à certains groupes armés opérant dans la région.
Tout est parti d’un incident survenu début avril 2025, lorsqu’un drone malien a été abattu par l’armée algérienne à la frontière. Depuis, le climat de méfiance s’est intensifié entre les deux voisins. Le Mali accuse Alger de s’ingérer dans ses affaires intérieures et de soutenir des groupes qu’il qualifie de terroristes, notamment ceux actifs dans la région de Kidal.
La reprise de Kidal par l’armée malienne, après des années de contrôle par des groupes armés rebelles, a été perçue comme une provocation par Alger, qui entretient des liens historiques avec certains de ces mouvements. Selon plusieurs sources concordantes, de nombreux cadres de la rébellion de l’Azawad détiennent la double nationalité malienne et algérienne. L’Algérie, qui a longtemps servi de médiateur dans les négociations avec ces groupes, semble désormais irritée par la volonté de Bamako d’imposer une solution militaire.
Il est aussi important de noter que la frontière entre rebelles et djihadistes est souvent floue dans cette région. Certains anciens chefs rebelles sont devenus des figures majeures de l’insurrection djihadiste, tandis que d’autres continuent d’évoluer dans une zone grise, oscillant entre collaboration, affrontement ou alliance de circonstance.
Au fil des années, les groupes djihadistes ont tissé des liens étroits avec les populations locales du nord du Mali. Plusieurs combattants se sont mariés dans des communautés tribales afin de bénéficier de leur protection. Ce tissage social rend la distinction entre rebelle, djihadiste ou simple habitant encore plus difficile pour les autorités maliennes.
Une résurgence inquiétante
Alors que les Forces armées maliennes (FAMa) avaient repris l’ascendant sur les groupes armés grâce à une série d’opérations offensives, elles se retrouvent à nouveau confrontées à une insécurité croissante. Les récentes attaques coordonnées contre les camps militaires de Dioura, Koulikoro, Tombouctou et Boulkessi révèlent une puissance de feu et un niveau d’organisation surprenants pour des groupes annoncés affaiblis.
D’où proviennent ces renforts humains et logistiques ? Qui fournit des renseignements aussi précis à ces groupes pour frapper avec autant de précision ? Ces questions pointent de plus en plus vers le nord, en direction de l’Algérie.
Il convient de rappeler que le groupe AQMI, très actif dans le Sahel, est une émanation du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), qui a longtemps combattu l’État algérien avant de se replier vers le Mali. Son leader emblématique, Iyad Ag Ghaly, connaît parfaitement les deux pays et bénéficie d’un solide ancrage local.
Pour certains observateurs, la stratégie de l’Algérie consisterait à maintenir les groupes armés hors de ses frontières, au Mali, pour mieux protéger ses zones gazières et pétrolières situées à proximité. Cette approche sécuritaire, dictée par des considérations économiques vitales, contribuerait à perpétuer un climat d’instabilité au Mali.
Au-delà de la dimension idéologique, le terrorisme dans la région sahélienne prend de plus en plus une allure économique. Les groupes armés contrôlent des pans entiers de territoires, prélèvent des taxes, assurent des trafics, et négocient leur influence. Mettre fin à cette dynamique nécessite non seulement une riposte militaire, mais aussi un combat de longue haleine sur les fronts diplomatique, économique et géopolitique.
Modibo FOFANA
Source : Mali24
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