Diéma : Le Baobab, un patrimoine familial
Dans le Cercle de Diéma, particulièrement dans les localités à dominance soninké, le baobab est considéré comme un patrimoine familial, exploité généralement par les femmes.
Cet arbre aux multiples vertus est surtout entretenu à cause de ses feuilles que les femmes réduisent en poudre pour la préparation de la sauce du «tô» ou du couscous. Chaque matin, quand le chef de famille sort du grenier la quantité de mil destiné au repas du jour, en plus de la mesure de sel, il puise dans la réserve de poudre de feuilles de baobab, appelé namougou fing. Une fois que le maître de la maison remplit ces conditions, il est exempté des dépenses liées aux condiments. C’est à la femme de se débrouiller pour trouver le reste des ingrédients et préparer à manger pour la famille.
Le baobab a pris une telle importance dans la localité que même si quelqu’un vous vend sa parcelle de terrain avec un pied de baobab, il ne renonce pas à son arbre. L’essence restera au compte de sa famille qui l’exploitera à sa guise.
Aïssata Konté explique : «Le baobab appartient surtout aux femmes. On en trouve généralement dans chaque maison. Ses feuilles jouent un rôle important dans l’économie familiale, car elles permettent de réduire parfois les dépenses des ménages. Pendant l’hivernage, on prépare souvent pour les cultivateurs de la boisson à base de poudre de pain de singe, associée à la pâte d’arachide avec un peu de sucre. C’est une recette qui les stimule».
La présidente de l’Association de santé communautaire (Asaco) de Fassoudébé, Coumba Dia, affirme que dans son village, les femmes plantent et entretiennent leurs propres pieds de baobab dans leurs périmètres maraîchers. Elles utilisent plus les feuilles de cet arbre et s’intéressent moins à ses fruits.
Au-delà le baobab sert à faire des cordes. Les Maures font la cueillette du pain de singe. Ils enlèvent les écorces pour confectionner des cordes en vue de la commercialisation. Ce Maure habitant à Dabaye-Laklal, Seibane Dicko, entretient quotidiennement le jeune pied de baobab qui se trouve devant sa case. Il empêche les animaux de l’effeuiller.
Mahéta Sacko, la cinquantaine révolue, est un imam. Il relève que tout est question de consensus. Si celui qui vend sa parcelle de terrain, qui contient un ou plusieurs pieds de baobab, accepte de céder à l’acheteur ses arbres, il n’y aucun inconvénient. Il faut faire en sorte qu’aucune des deux parties ne soient vexée lors de la transaction. L’islam est bâti sur la paix et la cohésion sociale, explique l’homme de foi. Fousseiny Sissoko, conseiller du chef de village, trouve absurde l’idée de vouloir garder son arbre dans la concession d’autrui. «Si un terrain contient cet arbre, il revient forcément à l’acheteur de la parcelle».
Contrairement à ceux qui prêtent de nombreuses vertus au baobab, Oumar Cissé, un bourrelier à la barbe hirsute, soutient la thèse contraire. Pour lui, le baobab est un arbre qui porte-malheur. Il n’hésite pas à incriminer le vieux baobab, vieux d’un siècle, qui trône dans une maison d’être à l’origine de multiples incendies survenus dans cette concession.
Mais une chose est sûre, il y a un réel engouement pour le baobab. Certains pensent que cette tendance permettra de sauvegarder cette espèce en voie de disparition. Pour d’autres, l’État et ses partenaires doivent soutenir les projets de promotion des activités de reboisement dans la bande sahélienne, en vue de renforcer la lutte contre la désertification et l’avancée du désert.
Ouka BA
Amap-Diéma