Mali: Le retrait de la CPI en question
Annoncé il y a quelques jours, au sortir d’un conclave de ministres de la justice de l’AES, le processus de retrait de la CPI des trois pays constitutifs de cette confédération est officiellement engagé, depuis avant-hier samedi. Le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont plaidé pour un effet immédiat de leur rupture, mais les textes du Statut de Rome exigent un intervalle d’une année franche au moins entre une requête de cette nature et l’effectivité de son entrée en vigueur. En se démarquant en pleine guerre antiterroriste du mécanisme onusien contre les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, les pays de l’AES le jugent inopérant et incompétent, tout en le qualifiant par ailleurs de justice sélective et complaisante à la solde de l’impérialisme. C’est du moins la substance de leur communiqué conjoint avec le sceau du président en exercice, Assimi Goïta et qui repose sur des raisons trop superficielles pour ne pas inspirer des questionnements sur les motivations ainsi que sur les implications de la démarche. Une des nombreuses interrogations a trait au timing, d’autant que la requête conjointe des trois pays intervient dans le sillage des pressions de plus en plus intenses de l’ONU, à travers ses experts indépendants sur les droits humains, pour la clarification de cas d’arrestations et de détention extrajudiciaires ou encore de disparition forcée de voix dissidentes dans l’espace sahélien. De quoi remuer le couteau peut-être dans la vieille blessure ayant déclenché la rupture définitive entre le Mali et la Minusma, suite à un certain rapport litigieux sur les opérations militaires de Moura. Un épisode parmi tant d’autres malaises précédemment documentés par les acteurs internationaux, dont l’objet de la brouille entre le Mali et la France dans la foulée de la cession du camp de Gossi par le contingent français aux FAMa.
Autant d’autres faits antérieurs pourraient ne pas être systématiquement couverts par la démarche des trois pays de l’AES, en vertu notamment des règles de fonctionnement de cette structure selon lesquelles un retrait de ses États membres n’a pas d’effet rétroactif sur les procédures en cours.
Les interrogations portent, par ailleurs, sur la portée d’une démarche assimilable à un précieux passe-droit aux groupes terroristes pour qui les gênants projecteurs de la CPI sur les pays du Sahel pourrait servir d’instrument dissuasif, depuis la condamnation d’éléments terroristes par cet organisme, dans le cadre des exactions perpétrées sur les populations civiles pendant l’occupation des trois régions du septentrion malien. À contrario, l’absence de toute dissuasion pénale internationale pourrait désinhiber les intentions criminelles et exposer des populations qui ne sont assurées d’aucune protection en cas de retour en force des sentences médiévales islamistes comme en 2012. Il va sans dire que ça n’est pas le mécanisme judiciaire endogène annoncé par l’AES qui pourrait les dissuader
Le Témoin
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