Sahel : Le PIB des pays pourrait diminuer de 7 à 12 % d’ici 2050
Le rapport national sur le climat et le développement (CCDR, en anglais), récemment publié le 19 septembre dernier par le Groupe de la Banque mondiale pour les pays du G5 Sahel, estime que le Produit intérieur brut des pays sahéliens pourrait diminuer de 7 à 12 % d’ici 2050. Une pareille chute implique que jusqu’à 13,5 millions de personnes supplémentaires pourraient basculer dans la pauvreté à travers la sous-région, du fait des chocs liés au changement climatique, si les investissements en matière d’adaptation ne sont pas lancés d’urgence.
Le Sahel est particulièrement vulnérable à la dégradation des terres et la désertification. La région est en effet confrontée à une sévère augmentation des sécheresses, des inondations, et autres impacts causés par le changement climatique. Trois des pays du G5, le Niger, le Mali et le Tchad, figurent parmi les sept pays les plus vulnérables au changement climatique dans le monde. Avec une augmentation prévue des températures 1,5 fois plus élevée que la moyenne mondiale, les pays du Sahel sont en train d’atteindre les limites de leurs capacités d’adaptation.
« Le changement climatique affecte sévèrement les populations et vient remettre en cause les gains de développement durement acquis. L’analyse indique que le changement climatique renforce les cycles de pauvreté, de fragilité, et de vulnérabilité dans le Sahel, » souligne Ousmane Diagana, vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique de l’Ouest et centrale. « Avec une population qui devrait doubler au cours des 20 prochaines années pour atteindre 160 millions de personnes, les pays du Sahel doivent prioriser l’adaptation climatique tout en accélérant leur croissance s’ils veulent concrétiser le dividende démographique et mettre la région sur la voie d’une croissance durable et inclusive. »
Alors que les émissions combinées des pays du G5 Sahel ne dépassent pas 1 % des émissions globales de gaz à effet de serre, ces cinq pays se sont engagés à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Par ailleurs, lors de la COP 26 à Glasgow, le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Tchad ont pris l’engagement de stopper et inverser la déforestation et la dégradation des terres d’ici 2030. Les Contributions déterminées au niveau national (CDN) dans le cadre de l’Accord de Paris ainsi que les estimations du CCDR indiquent que les besoins de financement des pays du G5 Sahel en matière d’atténuation climatique et de mesures d’adaptations se chiffrent en milliards de dollars. Le rapport montre que les dégâts causés par le changement climatique peuvent être significativement réduits, et que le coût de l’inaction s’avère bien plus élevé que celui de l’action.
« Il existe de réelles opportunités pour développer un Sahel résilient et sobre en carbone, » explique Clara de Sousa, directrice des opérations de la Banque mondiale pour le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Tchad. « Ce rapport fournit une feuille de route pour aider les pays à accélérer les réformes et les investissements afin de diversifier leurs économies et les rendre plus résilientes et plus inclusives. Il propose des démarches pour les reverdir en restaurant les terres dégradées et stimulant les opportunités économiques pour les communautés, par le biais de programmes tel que l’initiative de la Grande muraille verte. »
Des millions de personnes à travers la région sont exposées au risque ou déjà en situation d’insécurité alimentaire, du fait d’une production agricole décevante liée aux chocs climatiques, à la montée de l’insécurité, et à des prix alimentaires élevés. La crise de la sécurité alimentaire au Sahel devrait encore s’aggraver en 2022.
Pour atténuer l’impact de cette crise et aider le secteur agricole à développer sa résilience climatique à moyen terme, il convient d’étendre les programmes de protection sociale et les initiatives en faveur des paysages agricoles pour adopter de meilleures pratiques de gestion des ressources et accroître l’usage des technologies adaptives. Les cinq pays développent actuellement des systèmes de protection sociale adaptative permettant d’offrir régulièrement des transferts monétaires et des services aux ménages les plus pauvres et les plus vulnérables, afin de leur permettre de s’adapter et de faire face aux chocs climatiques à venir.
Le rapport propose d’autres recommandations de politiques pour étendre les acquis en matière de développement et d’adaptation dans cinq domaines ou secteurs spécifiques : les institutions, le financement climatique et l’atténuation des risques, l’énergie, la gestion des paysages \ et les villes. En matière d’énergie, les auteurs soulignent d’une part la formidable opportunité que représente l’exploitation des ressources d’énergie renouvelable pour la région et d’autre part l’intérêt potentiel du secteur privé pour améliorer l’accès à l’énergie.
Au cours des trois dernières années, le Groupe de la Banque mondiale a fourni un niveau de financement record aux pays du G5 Sahel dans le cadre de sa stratégie d’aide aux pays affecté par la fragilité, les conflits et la violence. Les financements de l’Association internationale de développement (IDA) s’élèvent à 8,9 milliards de dollars sur la période. Cependant les besoins engendrés par la crise climatique et la reprise économique post-COVID-19, l’insécurité croissante et la crise alimentaire, ainsi que les effets de la guerre en Ukraine sur les prix mondiaux des produits alimentaires, des engrais et de l’énergie exigent des niveaux d’engagements encore plus élevés.
Source : Communiqué de la Banque Mondiale