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Nord du Mali : L’ambassadeur d’Algérie aux USA jette les masques 

Lors d’un panel diplomatique à Washington, l’ambassadeur d’Algérie aux États-Unis, Sabri Boukadoum, a tenu des propos qui ont provoqué une onde de choc dans la région sahélienne

En affirmant que «le nord du Mali est une extension naturelle de l’Algérie : mêmes tribus, mêmes peuples, même vision», le diplomate a ravivé les tensions entre Alger et Bamako, réactivant les accusations d’ingérence et de visées hégémoniques.

Cette sortie, jugée inacceptable dans un contexte de lutte contre le terrorisme, est perçue par les États membres de l’Alliance des États du Sahel (AES) comme une remise en cause implicite de leur souveraineté et de l’intangibilité des frontières.

Ces propos interviennent dans un moment de recomposition géopolitique au Sahel, marqué par le déploiement des forces conjointes de l’AES, la montée en puissance des FAMa, et le renforcement de nouveaux partenariats stratégiques, notamment avec la Russie, la Chine et la Türkiye. En dénonçant «l’ingérence étrangère à nos portes», Boukadoum semble viser indirectement le soutien militaire russe au Mali, tout en affirmant une vision régionaliste qui suscite l’inquiétude.

Une fracture diplomatique aggravée

À Bamako, cette posture est interprétée comme celle d’un «voisin pyromane», à la fois médiateur autoproclamé et acteur de tensions. Elle creuse davantage le fossé diplomatique entre l’Algérie et les États de l’AES, qui défendent une souveraineté pleine sur l’ensemble de leur territoire.

Qualifier le nord du Mali de «prolongement naturel» de l’Algérie constitue une transgression majeure. Cette affirmation, justifiée par la présence de groupes terroristes et une critique voilée du partenariat russo-malien, est perçue comme une tentative d’ingérence manifeste. La ligne rouge est franchie.

Ces propos vont à l’encontre des principes du droit international et de la Charte de l’Union africaine, qui consacre l’intangibilité des frontières post-coloniales.

Présentée comme un impératif sécuritaire, cette position repose néanmoins sur une rhétorique identitaire préoccupante.

L’évocation de «mêmes tribus, mêmes peuples» soulève des interrogations sur la nature du discours diplomatique algérien. Pour plusieurs analystes, cette approche pourrait fragiliser la cohésion nationale dans les pays sahéliens en niant leur diversité historique. Certains y voient une stratégie d’influence culturelle et politique, s’inscrivant dans une dynamique régionale plus large, assimilable à une logique de substitution démographique.

L’Afrique sahélienne est à un tournant. Sa capacité à préserver son intégrité territoriale, sa diversité culturelle et son autonomie politique dépendra de sa résilience collective et de sa vigilance diplomatique.

Les propos de Boukadoum ont ravivé les inquiétudes autour d’une colonisation silencieuse ou d’un remplacement progressif des populations noires africaines par des groupes se réclamant d’une allégeance au monde arabo-musulman. Bien que le concept de «grand remplacement» soit controversé, certains analystes sahéliens l’utilisent pour décrire une dynamique perçue comme une offensive démographique et culturelle, structurée en plusieurs phases. Phase I (Maghreb) : arabisation culturelle et démographique des pays d’Afrique du Nord (Égypte, Tunisie, Maroc, Algérie, Libye), entraînant le repli des populations noires autochtones vers le Sud. Phase II (zone grise) : affirmation de l’appartenance au monde arabe en Mauritanie et au Soudan, précédée ou accompagnée de processus de marginalisation. Phase III (Sahel central) : arabisation avancée dans le nord du Mali, du Niger et du Tchad, avec l’installation de groupes se réclamant d’une identité araboïde. Phase IV (phase actuelle) : extension de cette dynamique vers le sud de ces mêmes pays, avec l’implication de milices terroristes (telles que le JNIM), accusées de dépeupler les zones noires et de favoriser leur remplacement.

Ces perceptions, bien que discutées, traduisent une crainte profonde d’effacement culturel et territorial, nourrie par des décennies de tensions non résolues.

L’AES vers une doctrine de contre-offensive face à l’ingérence

L’Alliance des États du Sahel ne peut rester passive face à ce qu’elle considère comme une menace existentielle. L’Algérie est désormais accusée de double discours : se présenter comme médiateur tout en entretenant, par des relais informels et des groupes armés, une instabilité chronique dans la région.

Pour le Mali et ses partenaires, toute solution politique doit être conditionnée par le respect absolu de la souveraineté nationale. L’époque où l’Afrique subsaharienne subissait les jeux de pouvoir sans réagir est révolue.

L’heure de la lucidité stratégique

Face à ces dérives, les États de l’AES sont appelés à renforcer leur unité diplomatique et militaire, à définir une doctrine de contre-ingérence claire, et à adapter leurs institutions aux défis géopolitiques contemporains. L’instauration d’un service militaire obligatoire est évoquée comme un levier de résilience nationale.

L’Algérie ne peut durablement prétendre au rôle de médiateur tout en adoptant une posture perçue comme celle d’un acteur de déstabilisation. Le Sahel doit défendre sa souveraineté, non seulement par les armes, mais aussi par une stratégie diplomatique cohérente, proactive et résolument panafricaine.

La légitimité des populations de l’AES en dépend pour une souveraineté retrouvée qui soutient notre dignité.

Khaly-Moustapha LEYE

L’aube

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