Ibrahim Traoré, le nouvel homme fort du Burkina (Portrait)
mali24 Le capitaine Traoré, 34 ans et ses hommes accusent Damiba d’avoir opéré des choix « hasardeux » qui « ont progressivement affaibli » le système sécuritaire du pays.
AA/Ouagadougou/Dramane Traoré
Huit mois après avoir renversé le président burkinabè Roch Marc Christian Kaboré, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba a été à son tour renversé vendredi, par un groupe de militaires de son propre camp, conduit par le capitaine Ibrahim Traoré, âgé de 34 ans.
Le capitaine Traoré et ses hommes accusent Damiba d’avoir opéré des choix « hasardeux » qui « ont progressivement affaibli » le système sécuritaire du pays.
Membre du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), le groupe de militaires qui avait renversé le 24 janvier dernier Kaboré, au profit du lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, le capitaine Ibrahim Traoré, était jusque-là le commandant du régiment d’artillerie de Kaya, la première région militaire, située à une centaine de kilomètres au nord de la capitale burkinabè.
Ce jeune officier burkinabè avait été nommé chef d’artillerie du dixième régiment de commandement d’appui et de soutien ,10è RCAS, en mars 2022 par l’ex président du Faso Paul Henri Damiba.
Le capitaine Traoré faisait partie des officiers qui ont organisé et soutenu le coup d’Etat qui a conduit le lieutenant-colonel Paul-Henri Damiba, ex-président du MPSR, au pouvoir le 24 janvier 2022.
C’est en 2010 après ses études universitaires à l’université publique de Ouagadougou, que Traoré intègre l’armée burkinabè.
Il sort lieutenant et est affecté au régiment d’artillerie, basé à Kaya dans la région du Centre-nord, pour le compte de la première région militaire.
En janvier 2022, alors que Roch Marc Christian Kaboré entame la deuxième année de son deuxième mandat suite à des élections remportées avec 57,87% de voix, en novembre 2020, la situation sécuritaire n’a cessé de se dégrader.
C’est ainsi que de jeunes officiers militaires burkinabè dont le capitaine Traoré, procèdent à son arrestation, obligeant Kaboré à rendre sa démission le 24 janvier. Ils mettent en place le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) dirigé par le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba qui devient plus tard président du Burkina Faso suite à la signature de la charte de la Transition.
Cependant, la situation sécuritaire qui avait été évoquée comme motif pour renverser le régime de Kaboré, ne s’est pas améliorée après huit mois de gestion par les militaires. Les attaques terroristes sont quasi-quotidiennes, avec de pertes considérables en vies humaines tant du côté de l’armée que des civils.
Plusieurs centaines d’écoles et d’infrastructures sanitaires sont fermées alors que des milliers de personnes continuent de fuir leurs villages à cause des violences.
Plus de 40% du territoire échappe au contrôle de l’Etat, selon les chiffres officiels évoqués par les anciennes autorités.
La grogne monte au sein de la population. Des manifestations sont organisées régulièrement dans les localités sous blocus des hommes armés terroristes pour dénoncer la gestion de la situation sécuritaire par Damiba et son gouvernent.
La dernière manifestation en date a eu lieu jeudi, à Bobo-Dioulasso dans la capitale économique (Ouest), pour protester contre une embuscade qui a visé lundi dernier, un convoi humanitaire au profit des populations de la ville de Djibo (Sahel). Le bilan toujours provisoire est de 11 soldats tués et une cinquantaine de civils portés disparus.
– La CEDEAO juge « inopportun » le coup de force
C’est dans ce contexte que des militaires ont entamé dans la nuit de jeudi à vendredi, un « mouvement d’humeur » qui a abouti à la chute de Damiba.
Les nouvelles autorités conduites par le capitaine Ibrahim Traoré, disent engager l’ensemble des forces combattantes à se recentrer sur la situation sécuritaire.
Ils ont, entre autres, annoncé la dissolution du gouvernement, la suspension de la constitution, de toute activité politique et de la société civile et la convocation prochaine des forces vives de la nation pour écrire une nouvelle charte et désigner un président civil ou militaire.
Dans sa déclaration lue à la télévision publique (RTB) vendredi soir, le groupe de militaires a tenté de rassurer la communauté internationale en affirmant que le Burkina Faso continuera de respecter ses engagements internationaux notamment les droits humains.
La Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a quant à elle jugé « inopportun » ce coup de force qu’elle a condamné dans un communiqué, avant d’exiger « le respect scrupuleux du chronogramme déjà retenu avec les Autorités de la Transition pour un retour rapide à l’ordre constitutionnel au plus tard le 1er juillet 2024 ».