Niono : Le chef de village de Tientienbougou introuvable depuis bientôt un an
C’est courant janvier 2021 que Lassina Konta, Chef de ce village Bozo a été enlevé alors qu’il était parti pêcher à environ 5km de son village. Depuis, il reste introuvable et l’inquiétude grandit chez ses proches.
Les faits :
En janvier 2021, Lassina Konta, est porté absent chez lui, par des éléments d’un groupe armé djihadiste opérant dans la zone. Les visiteurs intiment à sa famille de lui transmettre le message suivant : « Nous lui demandons d’évacuer le village, lui et ses concitoyens, afin d’éviter tout préjudice lors des affrontements qu’ils comptent mener contre les Dozos ».
Selon notre source, quelques jours plus tard, M. Konta est de nouveau appelé par les djihadistes qui lui demandent d’informer les villageois de les laisser accomplir leur mission « sans opposition ni dénonciation ».
Notre source explique que le chef de village qui a pris note n’aura pas eu le temps de concerter la population. « Alors qu’il se rendait comme à son habitude à Badalabougou, un village voisin, situé à 5 km du sien, Lassina Konta est enlevé par des Dozos. Ils l’accusent d’avoir coopéré avec les groupes armées djihadistes suite aux visites de ces derniers », explique-t-il.
Bientôt un an après les faits, les proches de M. Konta sont sans nouvelle. Malgré leur déclaration à la gendarmerie et une plainte déposée à cet effet, ils n’ont aucune nouvelle du chef de village.
Situé dans la Commune rurale de Mariko, dans le cercle de Niono (340 km de Bamako), le village bozo Tientienbougou, fait face, comme ceux de ses alentours, à une insécurité sans pareille et par ricochet, à des atteintes et violations des droits humains. Les villageois sont pris entre deux feux. Ils sont, en effet, obligés : soit de passer un accord avec les djihadistes pour pouvoir pratiquer leurs travaux champêtres, activité principale dans la zone, soit être à la merci des groupes armés et ne pas pouvoir aller travailler aux champs, leur source de revenus et de survie.
Dans les deux cas, ils n’ont aucune garantie car en concluant ces accords dont l’une des clauses principales est le port obligatoire du voile pour les femmes, les villageois se retrouvent dos à dos avec les Dozos qui combattent les djihadistes. « Les dozos disent considérer les villages qui ont passé des accords avec les djihadistes comme leur ennemies », explique un habitant que nous appellerons par ses initiales, M H.
Les villageois sont ainsi pris au piège des affrontements entre groupes armées djihadistes et chasseurs dozos, qui font la loi d’une zone à l’autre en l’absence des forces armées et de sécurité qui ne sont pas stationnées en permanence dans le secteur. « A Niono on peut dire qu’il y a trois forces. Il y a les groupes d’auto-défense qu’on appelle les Dozos, il y a également ceux qu’on appelle les groupes armées djihadistes et les forces armées et de sécurité », indique notre source qui ajoute que : « là où les forces armées et de sécurité ne sont pas là, ce sont les Dozos qui règlent les litiges ».
A Tientienbougou comme dans les villages voisins, les habitants ne savent plus sur quel pied danser et sont victimes de violations de leurs droits. Entre les djihadistes qui les obligent à se plier à leurs règles « sans opposition ni dénonciation », les dozos qui considèrent comme ennemis tous ceux qui ne sont pas avec eux et la non permanence des forces armées et de sécurité dans la zone, les populations sont réduites au silence par peur des représailles.
Moussa Soumounou
Correspondance particulière
Source : mali24