SONATAM-SA : Où sont passés les 5,3 milliards de francs CFA injustifiés sur les 6,48 milliards d’irrégularités financières ?
Alors que l’État malien peine à assurer le financement des services sociaux de base, une hémorragie financière d’une ampleur alarmante secoue la Société Nationale des Tabacs et Allumettes du Mali (SONATAM-SA). Une mission de vérification couvrant les exercices 2021 à 2024 (jusqu’au 30 septembre) a mis en lumière un scandale aux proportions vertigineuses : 6,48 milliards de francs CFA d’irrégularités financières, dont plus de 5,3 milliards demeurent à ce jour sans justification.
Le rapport d’audit est accablant. Il évoque notamment des surfacturations sur l’achat de matières premières, des avantages indus accordés au personnel, des droits de douane réglés sans aucun justificatif, des dépenses de missions farfelues, ainsi que des transferts suspects à des multinationales du tabac, telles que British American Tobacco et Philip Morris International. À elles seules, ces dernières ont perçu 1,49 milliard de FCFA sans aucune base légale ni document justificatif.
Encore plus préoccupant : près de 3,76 milliards de francs CFA de droits de douane se sont volatilisés dans une opacité totale, sans trace ni pièce comptable à l’appui. Une telle légèreté dans la gestion des finances publiques est d’autant plus choquante que l’État malien est actionnaire de la SONATAM.
Sur le plan administratif, la situation n’est guère plus reluisante. Le service d’audit interne, censé jouer un rôle de contrôle, est directement rattaché au Directeur général, en violation flagrante des textes en vigueur. Le recrutement d’expatriés s’est opéré en dehors de toute légalité, contournant les procédures établies. Le favoritisme semble désormais érigé en mode de gestion, au détriment de la transparence et du mérite.
Le Directeur des ressources humaines, garant des bonnes pratiques en matière de gestion du personnel, aurait piétiné les règles en vigueur, confirmant ainsi que les postes de responsabilité à la SONATAM ne sont plus attribués sur la base de la compétence, mais plutôt des affinités personnelles.
Face à la gravité des faits, le rapport d’audit a été transmis au Procureur de la République en charge du Pôle National Économique et Financier, ainsi qu’au Président de la Section des Comptes de la Cour Suprême. Mais dans un pays où de nombreux scandales sombrent dans l’oubli, l’opinion publique reste sceptique quant à l’issue de cette affaire.
Cette situation interpelle au plus haut niveau. Comment l’État peut-il continuer à fermer les yeux sur une telle gabegie au sein d’une entreprise stratégique ? La SONATAM-SA apparaît aujourd’hui comme le symbole d’un système à bout de souffle, rongé par les passe-droits, l’impunité et les intérêts privés.
Au-delà des chiffres, ce scandale révèle un véritable naufrage éthique et managérial dans une entreprise publique où les milliards s’évaporent dans un silence complice. Il est désormais impératif que les responsables soient identifiés et traduits devant la justice.
Massassi
Mali24
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